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11 octobre 2012 4 11 /10 /octobre /2012 21:30

Koguryo_UNESCO_3.jpgDepuis 2001, l’Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture (UNESCO) et la République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord) œuvrent pour la préservation de l’ensemble des tombes et peintures murales de Koguryo, témoignage exceptionnel de la culture de ce royaume ancien, de sa vie quotidienne, de ses croyances et de ses coutumes funéraires. Les tombes recèlent d’ingéniosité dans leur technique de construction, et abritent de vrais chefs-d’œuvre de peintures murales. En une décennie, les efforts conjoints de l’UNESCO et de la RPD de Corée - par le financement du projet Fonds-en-dépôt UNESCO/République de Corée (du Sud) - ont permis la formation de personnels sur les aspects techniques et scientifiques de la restauration et de la préservation ainsi que le renforcement des moyens financiers, humains et technologiques nécessaires à la sauvegarde de ce patrimoine culturel inestimable. Cette collaboration a largement contribué à l’inscription de l'ensemble des tombes et peintures murales de Koguryo sur la Liste du patrimoine mondial de l'UNESCO en 2004. Cette double histoire est relatée en 70 photographies exposées au Palais de l'UNESCO, à Paris, du 12 au 26 octobre 2012.

Koguryo_carte.JPGKoguryo était l’un des royaumes les plus puissants de la Chine du nord-est et de la moitié nord de la péninsule coréenne entre le 3ème siècle avant J.-C. et le 7ème siècle après J.-C. Les vestiges les mieux connus de ce patrimoine culturel sont des tombes construites en pierre et surmontées de tumulus en pierre ou en terre. Ces tombes, qui datent de la dernière période du Royaume de Koguryo, sont pour beaucoup ornées de magnifiques peintures murales et constituent pratiquement les seuls vestiges laissés par cette culture. Sur les quelque 10 000 tombes de Koguryo découvertes jusqu’à présent en Chine et en République populaire démocratique de Corée, une centaine seulement comporte des peintures murales, dont 80 en RPD de Corée. Parmi les tombes de Koguryo recensées en RPDC, 63 tombes individuelles dont 16 ornées de peintures murales font partie du bien inscrit sur la Liste du patrimoine mondial de l'UNESCO en 2004.

L’ensemble des tombes de Koguryo est un bien en série qui comprend plusieurs groupes de tombes et des tombes isolées situées pour la plupart au pied des montagnes et quelques-unes dans des villages. Situées à Pyongyang et dans les provinces voisines, ces tombes étaient vraisemblablement destinées aux rois, à la famille royale et à l’aristocratie.

On trouve plusieurs types de tombes, selon le nombre des chambres funéraires – chambre unique, deux chambres, plusieurs chambres et chambres secondaires. Elles illustrent la typologie complète des tombes de Koguryo et représentent des exemples remarquables d’un type d’édifice et de technologie. Les tombes sont constituées d’imposants tumulus avec des chambres funéraires en pierre. Leur construction révèle un grand savoir-faire et les plafonds ont été habilement conçus pour supporter la lourde charge du tumulus. La technologie utilisée repose sur une solution d’ingénierie très étudiée et novatrice, qui répond de manière originale aux problèmes techniques rencontrés dans la construction de tombes souterraines.

Koguryo UNESCO 2Les peintures murales constituent des chefs d’œuvre du genre. Les sujets représentés – vêtements traditionnels, aliments, cadre de vie, pratiques funéraires, ainsi que pratiques religieuses et imagerie associées au bouddhisme, au taoïsme et aux quatre déités - offrent un témoignage exceptionnel de la richesse et de la complexité de la culture de Koguryo aujourd’hui disparue. Les pratiques funéraires propres à cette culture ont exercé une influence importante sur d’autres cultures d'Asie du nord-est, comme celle du Japon.

L'Association d'amitié franco-coréenne vous convie à une exposition photographique exceptionnelle consacrée aux vestiges du Royaume de Koguryo et à leur préservation :

 

« Préservation des tombes et peintures murales de Koguryo, site du patrimoine mondial, en République populaire démocratique de Corée, 2001-2012 »

Palais de l'UNESCO

Salle des pas perdus

7, place de Fontenoy

75007 Paris

du 12 au 26 octobre 2012

de 10h à 18h30

contacts

Mme Han Jun-hi : 01 45 68 14 74 - j.han@unesco.org

Mme Shim Hye-seung : 01 45 68 18 21 - hs.shim@unesco.org

 

Pour en savoir plus sur l'ensemble des tombes et peintures murales de Koguryo inscrit sur la Liste du patrimoine mondial, consulter le site Internet de l'UNESCO

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19 août 2012 7 19 /08 /août /2012 12:59

concert_groupe_moranbong_7_juillet_2012_1.jpgLe 6 juillet 2012 s'est tenu, à Pyongyang, le premier grand concert du groupe Moranbong, nouvellement créé à l'initiative du dirigeant Kim Jong-un, et retransmis à la télévision (cf. vidéo intégrale du concert ci-dessous). Le groupe Moranbong a donné un autre concert, le 28 juillet, à l'occasion de la fin de la guerre de Corée, en présence des représentations diplomatiques étrangères. Tout en respectant les formes traditionnelles en République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord), le groupe Moranbong - exclusivement féminin, et dirigé par Sonu Hyang-hui - a procédé à une adaptation de chansons coréennes traditionnelles et a repris des airs étrangers, suivant des arrangements musicaux novateurs. Ce faisant, il a fait le pari d'un mariage audacieux entre musique classique et styles plus contemporains. Selon l'agence nord-coréenne KCNA, la volonté du dirigeant Kim Jong-un est d'opérer cette année "un tournant spectaculaire dans le domaine des arts et de la littérature", à l'aube du deuxième centenaire de l'ère Juche.

 

Si l'AAFC ne partage pas les conclusions et les orientations d'Adam Cathcart, ses analyses - qui, au demeurant, se réfèrent occasionnellement à nos articles - offrent un éclairage intéressant sur la République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord). Dans un article publié le 12 juillet 2012, il observe ainsi avec pertinence que les préoccupations musicales de Kim Jong-un, Premier secrétaire du Parti du travail de Corée, sont réelles, et héritées du dirigeant Kim Jong-il et du Président Kim Il-sung, qui avait été "organiste et pouvait parler avec finesse du sens de la modulation".

 

Dans ce contexte, le premier grand concert du groupe Moranbong, créé à l'initiative du dirigeant Kim Jong-un, donné le 6 juillet 2012, offre une illustration des évolutions artistiques en cours en RPD de Corée. Une symbiose est opérée entre la tradition musicale de la RPD de Corée et des novations, tant formelles que dans le contenu même du concert. La guitare électrique et les synthétiseurs sont largement utilisés, en combinaison avec les violons, les violoncelles et le piano, en l'absence des instruments coréens traditionnels. Les réaménagements d'airs traditionnels (comme Baeouja, qu'on peut traduire par Apprenons) ou le classique Arirang, qui fait partie du patrimoine commun à toute la Corée, donnent un style enjoué qui rompt l'habituelle progression des spectacles en Corée du Nord. En effet, ceux-ci suivent une dynamique historique ternaire, où alternent les souffrances de la colonisation japonaise, la construction glorieuse du socialisme - interrompue par l'épisode douloureux de la guerre de Corée - et la perspective ultime de la réunification.

 

concert_groupe_moranbong_7_juillet_2012_2.jpg

 

Le chant des adieux Arirang est ainsi placé en début de concert et les références historiques sont peu présentes. La structure du concert se fonde essentiellement sur une double alternance :

- d'une part, entre des compositions plus légères et des morceaux de bravoure, au lyrisme révolutionnaire ;

- d'autre part, entre des chants à la sensibilité aiguë et des moments de détente, où les reprises de chansons étrangères occupent une place importante et sont présentés comme tels - jusque dans la scénographie. A 59'50", on pourra ainsi reconnaître quelques notes de My Way (Comme d'habitude). Suivant le voeu du dirigeant Kim Jong-un, il ne s'agit donc pas de rejeter les cultures étrangères, mais de les intégrer au patrimoine coréen en tenant compte de la sensibilité des Coréens.

 

Contrairement à une idée reçue, la culture de la RPD de Corée n'est pas - et n'a jamais été - hermétique aux influences étrangères. Ainsi, dès ses origines, le cinéma nord-coréen, né de la résistance à l'occupation japonaise, a grandi parallèlement au jeune cinéma soviétique, comme l'a notamment montré Antoine Coppola. Les grands opéras révolutionnaires, créés par le dirigeant Kim Jong-il au début des années 1970, ont introduit dans la culture nord-coréenne des influences héritées non seulement de la culture traditionnelle coréenne, mais aussi russes et chinoises. Cette ouverture s'est aussi traduite, par exemple, par la traduction de l'histoire de Dumbo dans les livres pour enfants nord-coréens. L'apparition des personnages de Walt Disney lors du concert du 6 juillet dernier - qui a tant surpris les médias étrangers - n'est que l'aboutissement d'une évolution progressive, ces personnages faisant partie de longue date de la culture populaire nord-coréenne.

 

concert_groupe_moranbong_7_juillet_2012_3.jpg

 

Si la création du groupe Moranbong répond d'abord à une volonté de politique intérieure, elle pourrait toutefois également devenir une composante du soft power nord-coréen. Les commentaires des vidéos des concerts diffusés sur Youtube montrent ainsi un accueil plutôt favorable du public occidental, à laquelle la beauté des artistes du groupe Moranbong n'est pas totalement étrangère. Toutefois, à notre sens les pays d'Asie de l'Est devraient être les plus réceptifs aux nouvelles formes musicales de la culture pop nord-coréenne. L'exacerbation des sentiments, une sensibilité à fleur de peau - si propres à la sensibilité coréenne, dans toute la péninsule - trouvent des échos favorables tant en Chine qu'en Asie du Sud-Est, où un certain style mélodramatique imprègne la culture populaire. En célébrant la participation des volontaires chinois aux combats de la guerre de Corée, le second concert du groupe Moranbong, le 28 juillet (photo ci-dessous), a ainsi repris la musique d'une série télévisée chinoise, Mao Anying, du nom du fils aîné du Président Mao, mort sur le front coréen.

 

concert_groupe_moranbong_28_juillet_2012.jpg

 

Quelle conclusion tirer de l'implication personnelle du Premier secrétaire Kim Jong-un dans la constitution du groupe Moranbong ? La musique est partie intégrante de la société nord-coréenne : elle rythme les journées de travail comme les loisirs et les rassemblements de masse. Elle imprime sa marque à la construction du socialisme dans un pays où le collectif prime sur l'individu. Après les années de souffrances de la dure marche, où le Premier secrétaire Kim Jong-un a loué le stoïcisme du peuple coréen, le nouveau dirigeant est sincèrement attaché à ce que s'ouvre une nouvelle ère de prospérité, où les travailleurs pourraient jouir des fruits des efforts accomplis depuis trois générations. Une aspiration profonde des Nord-Coréens s'exprime en ce sens, notamment parmi les générations les plus jeunes. Pour autant, ce n'est pas "la fin de l'histoire" : le concert du groupe Moranbong s'achève sur une note d'héroïsme révolutionnaire, vers de nouveaux lendemains qui chantent : un nouvel élan doit régénérer la révolution coréenne, en imprimant sa marque dans les arts. La révolution est inachevée, le processus révolutionnaire doit se poursuivre, en exigeant, à présent, l'avènement d'une nouvelle ère de prospérité : tel est bien le message politique délivré par le concert du 6 juillet.

 

concert_groupe_moranbong_7_juillet_2012_4.jpg

 

 

 

 

Principale source : KCNA (dont photos). Vidéo du concert : Youtube

 

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3 août 2012 5 03 /08 /août /2012 21:03

Le réalisateur et photographe Chris Marker est décédé le 29 juillet 2012. En 1958, cinq ans après la fin de la guerre de Corée, un voyage en République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord) avait donné lieu à la publication en 1959 d'un recueil de photographies, Coréennes, décrit par son auteur comme un court-métrage réalisé avec des images fixes, ou un "ciné-essai" Coréennes apparaît comme une étape, du double point de vue du voyage fait par Chris Marker et de l'apport ultérieur des photographies de Coréennes à l'oeuvre de l'artiste.

 

En 1958, à l'invitation des autorités nord-coréennes, un groupe d'intellectuels et de journalistes français a visité la République populaire démocratique de Corée. Parmi eux, Chris Marker côtoie Claude Lanzmann, qui se complaît dans le rôle du Français du groupe systématiquement critique sur tout ce qu'il voit - à qui l'auteur de La Jetée n'adressa pratiquement pas la parole, et qui tirera de son voyage un récit de quelques pages dans le Lièvre de Patagonie sur une liaison supposée, sans doute fortement romancée, avec une infirmière nord-coréenne. Parmi les autres participants, le chansonnier Francis Lemarque, proche du Parti communiste français, et futur membre fondateur de l'Association d'amitié franco-coréenne (AAFC) en 1969, réalisera un témoignage sous forme d'un film muet de quarante minutes.

 

Toujours dans le groupe de Français, Armand Gatti et Jean-Claude Bonnardot réaliseront la première co-production entre la France et la RPD de Corée, Moranbong, dont l'histoire a été reconstituée par Jérémy Segay, et qui a été montré au Festival international du film de Pyongyang en septembre 2010. L'idée du film est née des discussions lors d'un des deux dîners des membres de la délégation avec le Président Kim Il-sung (photo ci-dessous). Le film devait ensuite être frappé par la censure en étant interdit d' "exploitation" et d' "exportation", car présentant les troupes des Nations Unies "sous un jour peu favorable". Comble d'ironie, la décision d'interdiction a été prise sous la signature du ministre de l'Information du général de Gaulle, Louis Terrenoire, qui devait quelques années plus tard devenir président de l'AAFC.

 

lanzmann gatti chris marker kim il sung 1958 

Couverture_Coreennes_Chris_Marker.jpgPour sa part, dans Coréennes, Chris Marker a choisi d'éluder les traumatismes et les blessures de la guerre de Corée encore toute proche, en mettant l'accent sur l'expérience humaine du regard et du visage - comme celui de cette Coréenne, Ri Hae-sun, en illustration de couverture, tenant à la main un mouchoir blanc (photo à droite, source) - pour retracer l'histoire et l'avenir de la Corée - qui n'est ainsi jamais qualifiée "du Nord" - en une succession de récits.

 

Du point de vue de l'oeuvre de l'artiste, André Habib et Viva Paci ont montré que le recueil Coréennes avait occupé une place importante dans la création de Chris Marker, à la fois par la définition d'un style et la réapparition des photographies de Corée dans des oeuvres ultérieures :

 

"Le lecteur ne sait jamais si les scènes photographiées le sont telles quelles, ou si elles proviennent d'une partie d'un film non dévoilé, ou si elles sont simplement un accompagnement, voire une illustration d'un autre texte. Certains fragments photographiques se retrouvent dans d'autres productions de Chris Marker (par exemple le cliché de la couverture ou celui d'un danseur) notamment dans le film Si j'avais quatre dromadaires, puis plus récemment dans l'installation Immemory One, en 1997, et ensuite dans un onglet du CD-Rom Immemory.

 

Chris Marker présente des scènes séparées, des éléments parfois éparpillés dans l'espace du pays qu'il visite, qui sont repris, abordés et étudiés systématiquement sous un autre angle dans ses films et ses installations. Coréennes apparaît comme une matrice dont les idées, les sentiments, les sensations et les commentaires seront intégrés dans des productions postérieures. Plusieurs questions naissent : la narration visuelle a-t-elle une valeur de documentaire historique ou simplement sert-elle d'anticipation aux productions filmiques ? Quels statuts possèdent ces photographies ? Sont-elles des facteurs servant à l'évocation d'un souvenir résonnant face à une actualité particulière ?"

 

Sources :

- André Habib, Viva Paci, Chris Marker et l'imprimerie du regard, L'Harmattan, 2008. Ouvrage en partie consultable sur Internet à l'adresse suivante, p. 219 sq (citation p. 226) ;

- Jean-Pierre Thibaudat, "Moranbong" : l'incroyable histoire du premier film franco nord-coréen, article publié le 3 novembre 2010 (dont photo avec le Président Kim Il-sung).

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23 juin 2012 6 23 /06 /juin /2012 20:12

Suivant de très près le roman éponyme d'Eugène Pouchkine, Eugène Onéguine de Piotr Ilitch Tchaïkovski, dont la première a eu lieu au théâtre Maly à Moscou le 29 mars 1879, est devenu un des classiques de l'opéra mondial, adapté dans de nombreuses langues. En République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord), Eugène Onéguine a été joué pour la première fois en 1958. Le 22 juin 2012 s'est tenue la centième de l'opéra de Tchaïkovski au Conservatoire Kim Won-gyun de Pyongyang, dans une nouvelle version coréenne jouée depuis juin 2009.

 

En 1958, les étudiants et les professeurs du Conservatoire Kim Won-gyun de Pyongyang représentaient pour la première fois, dans le nord de la péninsule coréenne, l'opéra Eugène Onéguine de Tchaïkovski, en présence du Président Kim Il-sung.

 

Cinquante-et-un ans plus tard, en juin 2009, une nouvelle version coréenne du célèbre opéra russe était à nouveau donnée au Conservatoire Kim Won-gyun, suivant les conseils du dirigeant Kim Jong-il - auteur d'un traité sur l'art de l'opéra - qui avait assisté à une représentation et félicité les jeunes étudiants pour leur capacité à restituer une des pièces maîtresses de l'opéra mondial. A côté d'autres chefs d'oeuvre de l'opéra mondial, Eugène Onéguine s'ajoute, dans le répertoire de la RPD de Corée, aux classiques révolutionnaires comme Mer de sang ou La Jeune bouquetière, également un des classiques du cinéma nord-coréen et dont des représentations ont été données à Lanzhou en juin 2012.

 

La version nord-coréenne de l'opéra Eugène Onéguine met l'accent sur la vie corrompue de la noblesse russe, à la fin de l'ère tsariste. Conformément à la tradition confucéenne, l'art en Corée a une valeur édificatrice.

 

eugene_oneguine_pyongyang_1.jpg

 

eugene_oneguine_version_coreenne_1.jpg

 

eugene_oneguine_version_nord_coreenne_2.jpg

 

La centième représentation de l'opération de Tchaïkovski s'est tenu au Conservatoire Kim Won-gyun de Pyongyang le 22 juin 2012, en présence de Kim Ki-nam, secrétaire du Comité central du Parti du travail de Corée (photos ci-dessus).

 

Beaucoup des chanteuses et des chanteurs d'opéra parmi les plus célèbres en RPD de Corée ont été formés à l'école secondaire spécialisée Tongan, à Pyongyang (photo ci-dessous). Parmi les élèves de l'école Tongan, la soprano Ri Hyang-suk a obtenu le premier prix au 11ème Concours international Giuseppe di Stefano, et une récompense a également honoré Paek Mi-yong au Concours international de chant Maria Canilia en octobre 2003.

 

ecole_tongan_pyongyang.jpg

 

Principale source : KCNA, notamment dépêches des 23 mai ("Tongan Secondary School, Producer of Talented Artistes") et 22 juin 2012 ("100th Performance of Opera 'Evgeni Onegin' Staged").

 

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9 juin 2012 6 09 /06 /juin /2012 10:45

Le Musée des Beaux-Arts de Corée a été créé en 1954 à Pyongyang, capitale de la République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord), sur les rives du fleuve Taedong. Après une réouverture en 2010 suite à des travaux, sur une superficie de plus de 10.000 m2 les collections du Musée exposent quelque 800 pièces, dans une trentaine de salles, et sont divisées en deux parties : les oeuvres anciennes, depuis les premiers royaumes coréens jusqu'à la dynastie des Ri (1392-1910), et les oeuvres contemporaines, créées depuis l'époque de la lutte de libération contre l'occupation japonaise. Nous présentons ci-après les reproductions des peintures murales du Koguryo, dont les tombeaux sont classés au patrimoine mondial de l'UNESCO, conservées dans les collections anciennes du Musée, et qui offrent un panorama des principales fresques tombales du Koguryo dans le Nord de la péninsule.

 

Les fresques murales offrent un large aperçu de l'art et de la vie quotidienne à l'ère du Koguryo (jusqu'en 668), car il était d'usage d'orner les tombeaux royaux de peintures et d'objets funéraires représentant la vie réelle. La plupart des fresques ont été peintes sur les murs enduits de plâtre. Mais d'autres peintures ont aussi été réalisées sur les angles des parois décorés de colonnes et de chapiteaux, ainsi que sur les surfaces aplanies des murs rupestres, et d'autres encore sur les colonnes et les chapiteaux aménagés à l'imitation des bâtiments terrestres en bois. On peut notamment voir, au Musée des Beaux-Arts de Pyongyang, une reproduction du Portrait du roi (photo ci-dessous), un Cortège, du Portrait de la reine et une Ecurie provenant du tombeau royal n° 3 d'Anak - du nom de l'arrondissement où il se trouve et a été découvert en 1949, dans la province du Hwanghae du Sud, et datant de 357 d'après une épitaphe. Le nom de l'occupant fait l'objet de débats entre historiens.

 

portrait_du_roi_tombeau_royal_anak_n-_3-copie-1.jpg

D'autres reproductions de peintures, de la fin du quatrième et du début du cinquième siècles de notre ère, concernent le tombeau n° 1 de Changcheon (comme La chasse) et du tombeau de la commune de Susan (Le roi et les saltimbanques). 

 

On peut également observer des créatures fantastiques (Génies portant respectivement sur leur tête le soleil et la lune, et Le dragon bleu, peintures du sixième siècle du tombeau n° 5 de Jian), et des représentations d'animaux, réels ou imaginaires (voir deux fresques du septième siècle : Le tigre blanc, du tombeau moyen de Kangso, et La tortue-serpent, du grand tombeau de Kangso).

 

Sources :

- Le Musée des Beaux-Arts de Corée, éditions en langues étrangères de Pyongyang, 1985 ;

- Korean Art Gallery Reconstructed, dépêche de l'agence KCNA, 20 mai 2010.

Photo wikipédia.

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15 mars 2012 4 15 /03 /mars /2012 13:35

Pour la première fois en France, l'Orchestre Unhasu de la République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord) s'est produit salle Pleyel, le 14 mars 2012, sous la conduite du maestro sud-coréen Chung myung-whun, lors d'un concert conjoint avec l'Orchestre philharmonique de Radio France, que dirige Chung Myung-whun. L'Association d'amitié franco-coréenne, dont de nombreux membres étaient présents à cet événement, a tenu à témoigner d'un moment d'émotion exceptionnel, tant artistiquement que diplomatiquement : soixante-dix jeunes virtuoses nord-coréens, âgés en moyenne d'une vingtaine d'années, ont manifesté un talent et une maîtrise artistiques incomparables, sous la baguette d'un chef sud-coréen qui compte parmi les meilleurs de sa génération, et sous les regards d'un public composé de nombreux Sud-Coréens, émus aux larmes.

Concert 14032012

Quatre ans après le concert exceptionnel de l'Orchestre philharmonique de New York à Pyongyang, qui avait révélé au monde la virtuosité des musiciens de la RPD de Corée, quarante ans après les représentations  de la troupe de Mansudae au théâtre des Champs-Elysées, c'est une autre page de l'histoire culturelle qui s'est écrite, mercredi 14 mars 2012, salle Pleyel.

Dans son allocution d'ouverture, Frédéric Mitterrand, ministre de la Culture, a souligné comment la musique rapprochait les coeurs des hommes et des peuples. Jean-Luc Hees, président-directeur général de Radio France, S.E. Monsieur Yun Yong-il, délégué général de la République populaire démocratique de Corée en France, ambassadeur auprès de l'UNESCO, l'ancien ministre Jack Lang, dont l'action comme représentant du Président de la République a conduit à l'ouverture pour la première fois d'une représentation diplomatique française à Pyongyang, le sénateur Jean-Claude Frécon, président du groupe d'étude et de contact du Sénat France-RPDC, faisaient partie des nombreuses personnalités présentes, dans une salle Pleyel pleine à craquer, malgré l'annonce tardive de ce concert, historique à plus d'un titre.

La première partie, jouée exclusivement par l'Orchestre Unhasu sous la direction de deux jeunes chefs d'orchestre de la RPD de Corée, Ri Myong-il et Yun Pom-ju, a manifesté avec éclat la perfection technique des jeunes artistes, la plupart âgés d'une vingtaine d'années, qui ont su allier puissance et brio, dans une maîtrise collective propre aux artistes coréens de l'ensemble de la péninsule. L'alternance, réussie, de pièces de musique traditionnelle coréenne et de morceaux de musique classique européenne a créé un ensemble inédit, riche en émotions. Musiciens et spectateurs ont communié dans un même partage de ces moments d'intensité musicale exceptionnels, ayant aussi permis aux plus grands noms du classique française de découvrir une culture musicale unique, héritière d'une tradition nationale plurimillénaire.

La seconde partie, exclusivement dédiée à la Symphonie n°1 de Brahms, a été jouée conjointement par les musiciens du Philharmonique de Radio France et de l'Orchestre Unhasu, sous la baguette du maestro sud-coréen Chung Myung-whun, qui s'est surpassé dans une interprétation d'une puissance de feu éblouissante. La spontanéité et l'enthousiasme des jeunes artistes coréens se sont conjugués harmonieusement avec le jeu des musiciens, souvent plus âgés, de l'Orchestre de Radio France.

Concert_14032012-2.jpg

Sous un tonnerre d'applaudissements, Chung Myung-whun a fait part de son émotion de jouer en famille, avec sa famille musicale, celle de l'Orchestre de Radio France, mais aussi une famille coréenne divisée en deux Etats distincts, que réunissent pourtant un même langage, une même culture. Il a dédié ce concert à sa mère, décédée l'an dernier, qui aurait pu témoigner du souvenir d'une Corée qui n'était pas encore divisée, et qui rêve de réunification. Ces propos ont été ceux d'un homme courageux et de convictions, alors que les Sud-Coréens restent soumis à la loi de sécurité nationale qui interdit tout contact avec le Nord. Dans les entretiens à la presse qu'il a donnés à l'occasion de ce concert unique en France, pierre angulaire dans les relations entre la France et la RPD de Corée, le maestro, qui dirige également l'Orchestre municipal de Séoul, a déclaré assumer pleinement les conséquences de ce concert.

Deux bis ont permis de découvrir ou redécouvrir Arirang, chant traditionnel propre à toute la Corée, dans toute l'émotion de ce chant d'adieux, puis de terminer cette soirée exceptionnelle sur le dynamisme des célèbres notes de Carmen, dédié à la France et à tous ceux qui ont contribué à cet événement musical.

L'Association d'amitié franco-coréenne partage le rêve du maestro Chung que ce moment d'émotion sans pareil  soit la première étape vers d'autres manifestations, comme autant de témoignages de l'unité, culturelle, de la Corée - et de la contribution de la France à répondre à l'aspiration de tout un peuple à la réunification de sa patrie. D'ores et déjà, Chung Myung-whun a évoqué avec la presse un autre concert au Théâtre du Châtelet, le 1er juin 2012.


L'intégralité du concert de l'Orchestre Unhasu et de l'Orchestre Philharmonique de Radio France

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12 mars 2012 1 12 /03 /mars /2012 21:46

Le 11 mars 2012, les musiciens de l'Orchestre Unhasu de la République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord), conduits par Kwon Hyok-bong, conseiller à l'Institut de la musique traditionnelle coréenne, sont arrivés à Paris pour jouer avec l'Orchestre de Radio France, dirigé par le Sud-Coréen Chung Myung-whun, également directeur de l'Orchestre philharmonique de Séoul. A leur arrivée, ils ont été accueillis par le directeur général de Radio France, les représentants de la délégation générale de la RPD de Corée en France, ambassade auprès de l'Unesco, et d'autres officiels.

 

 Organisé avec le soutien de la salle Pleyel ainsi que du ministre français de la Culture Frédéric Mitterrand, le concert qui se tiendra salle Pleyel, le 14 mars 2012 à partir de 20h30, sera diffusé en direct sur www.citedelamusiquelive.tv et www.arteliveweb.com.

 

La première partie comportera des pièces du répertoire traditionnel coréen (La jeune fille au trapèze pour orchestre classique et traditionnel coréen, suivi d'une pièce pour deux instruments traditionnels coréens et orchestre et d'une pièce pour orchestre) et un extrait symphonique classique (Introduction et rondo capriccioso pour violon et orchestre, de Camille Saint-Saëns), tous joués par l'Orchestre Unhasu. Le 14 mars, l'Orchestre Unhasu - dont le nom signifie "Voie lactée" - sera dirigé par deux jeunes chefs, Ri Myong-il et Yun Pom-ju. Il est le plus célèbre des orchestres symphoniques de RPD de Corée, qui joue à l'occasion des grandes fêtes nationales (ci-dessous, lors du concert donné à Pyongyang à l'occasion du jour de l'Etoile brillante, le 16 février 2012).

 

orchestre_unhasu_16_fevrier_2012.jpg

 

En deuxième partie, la symphonie n° 1 de Johannes Brahms sera interprétée conjointement par l'Orchestre Philharmonique de Radio France et l'Orchestre Unhasu, sous la direction de Chung Myung-whun.

 

mun_kyong_jin.jpgLes noms de trois autres artistes figurent à l'affiche du concert : Nam Un-ha, au haegum (sorte de petit violon joué avec un archet mais posé sur les genoux), Jo Ok-ju, au kayagum (sorte de cithare jouée avec les doigts) et Mun Kyong-jin (premier violon).

 

Né à Pyongyang en 1981, Mun Kyong-jin est diplômé de l'Institut de musique et de chorégraphie de Pyongyang et a étudié au Conservatoire d'Etat de Moscou en 2005-2006. Ayant obtenu le premier prix à la compétition nationale de violon à Pyongyang en 2000, il a également obtenu le premier prix à la compétition internationale Canetti à Miskolc, en Hongrie, organisée du 15 au 20 juillet 2005, et le deuxième prix à la troisième compétition internationale de violon Paganini organisée à Moscou, toujours en 2005. Pour le concert conjoint donné à Paris, il a déclaré à l'agence AP : "malgré les différences linguistiques, j'espère que nous pourrons facilement nous comprendre à travers la musique et devenir amis".

 

Toujours dans un entretien accordé à l'agence AP, Jo Ok-ju a témoigné vouloir faire connaître à un public occidental la musique coréenne traditionnelle.

 

Lors de la conférence de presse qu'il a donnée le 7 mars dernier, Chung Myung-whun a déclaré que, à terme, il souhaiterait faire jouer des musiciens nord-coréens au sein de l'orchestre qu'il dirige chaque été, l'Asian Philharmonic, voire diriger l'Orchestre Philharmonique de Radio France à Pyongyang.  

 

Radio France a déclaré espérer, grâce à la musique, ouvrir la voie au dialogue et faire tomber des barrières qui paraissent infranchissables.

 

Sources :

- site de la salle Pleyel ;

- KCNA (dépêches du 21 février 2012, du 11 mars 2012) ;

- Radio France ;

- AP ;

- compétition internationale de violon Paganini (biographie et photo de Mun Kyong-jin).

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26 février 2012 7 26 /02 /février /2012 10:53

La principale salle de la Maison des associations du 16ème arrondissement de Paris était pleine pour suivre la conférence du Professeur Patrick Maurus "Corée du Nord : une nouvelle littérature pour une nouvelle société ?", organisée le mercredi 22 février 2012 par le comité régional Ile-de-France de l'Association d'amitié franco-coréenne (AAFC). Cet intérêt est à la hauteur du souhait de nombreux Français de mieux connaître la culture et la société de la République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord), comme en témoigne la vente à plus de 8 000 exemplaires du premier roman nord-coréen publié en France, Des amis, de Baek Nam-ryong, traduit en français par le Professeur Patrick Maurus. En effet, la littérature est une fenêtre sur la société, qui permet de sortir des clichés et des idées reçues sur la Corée du Nord.

Lors d'une première conférence à la Maison des associations du 16ème arrondissement, toujours à l'invitation de l'AAFC, en janvier 2010, Patrick Maurus avait fait preuve d'optimisme quant au décollage économique de la RPD de Corée, à contre-courant de nombre de ses contradicteurs. Son dernier voyage en Corée du Nord, en septembre 2011, l'a convaincu de la justesse de cette analyse, au regard des changements spectaculaires en cours. Les tendances littéraires actuelles en RPD de Corée traduisent effectivement l'émergence d'une nouvelle société, à la mesure des changements économiques perceptibles.

 

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La genèse d'un ouvrage traduisant une nouvelle forme de réalisme social

 

Revenant sur la genèse de la publication en France du roman Des amis, Patrick Maurus a rappelé que, depuis 1989 et la première publication de textes littéraires coréens dans la collection qu'il dirige à Actes Sud, il a lutté contre le comportement hémiplégique consistant à ne retenir de la littérature coréenne que les écrits du Sud, en ignorant les textes du Nord, comme d'ailleurs ceux du district autonome coréen de Yeonbyeon, en Chine. Pour parler de la Corée du Nord, il a souhaité donner la parole aux Nord-Coréens, pour exprimer ce qu'ils sont, en sachant que, de la même façon que lorsque vous invitez des amis chez vous, ceux-ci ont à coeur de vous montrer ce qu'ils ont de mieux, à contre-courant des a priori contre la RPD de Corée fortement ancrés dans les médias occidentaux, et singulièrement les médias français. Les journalistes s'en justifient en expliquant que, faute d'accès selon eux au pays, ils ont carte blanche pour donner leur propre vision de la Corée du Nord. Pourtant, il n'est pas du tout impossible à un journaliste d'aller en Corée du Nord. D'ailleurs, Patrick Maurus s'est employé à  expliquer aux Nord-Coréens que, même si une infime partie seulement des journalistes publiaient à leur retour des articles informés sur leur pays, l'enjeu était réel au regard de l'actuelle couverture de presse très négative. 

 

Des amis montre qu'il est possible d'avoir une appréciation positive de la Corée du Nord : à l'exception d'une petite minorité d'articles de presse, qui ont préféré décrier la Corée du Nord qu'ils imaginaient plutôt que présenter un ouvrage qu'ils n'avaient pas lu, les retours de la presse ont été très positifs. Mieux encore, certains journalistes ont reconnu que, jusqu'ici, ils parlaient de la Corée du Nord sans la connaître.

 

La publication du premier roman nord-coréen en France a été un processus long, fait d'explications auprès des autorités nord-coréennes qui ne voyaient pas toujours favorablement la démarche du Professeur Patrick Maurus qui avait publié auparavant quelque 45 ouvrages sud-coréens à Actes Sud.

 

La question se posait du choix de l'oeuvre, parmi les centaines d'ouvrages nord-coréens que Patrick Maurus a pu réunir dans sa bibliothèque personnelle. En effet, le premier texte publié serait inévitablement considéré comme représentatif et emblématique. Son choix s'est porté sur un roman d'un courant littéraire connu en Occident comme celui du 15 avril, du nom de sa maison d'édition, alors que les Nord-Coréens considèrent qu'il n'existe pas de tel mouvement littéraire. En fait, au tournant des années 1980 et 1990, le Président Kim Jong-il a donné des instructions pour encourager une littérature proche de la vie quotidienne, traduisant pleinement l'aspiration au réalisme juchéen. Dans cette perspective, de nombreux textes ont rendu compte de l'héroïsme de personnages anonymes, luttant contre les difficultés propres à la "dure marche" des années 1990. Mais si la première publication d'un roman nord-coréen en France avait puisé parmi ces textes, des critiques auraient immanquablement dénoncé une littérature comme relevant selon eux de la propagande, car constituant une littérature engagée ne répondant pas aux normes occidentales.

 

Des amis est, en revanche, un texte purement littéraire. Le livre a été promu par le Président Kim Jong-il comme emblématique du réalisme social auquel doivent s'attacher les écrivains dans les ouvrages publiés par la maison d'édition du 15 avril. Plus globalement, la littérature, le cinéma et, dans une moindre mesure, les feuilletons en Corée du Nord rendent compte des difficultés générées par le développement économique et social, et Kim Jong-il demande aux artistes d'en être les témoins.

 

Patrick Maurus a rencontré l'auteur de Des amis, Baek Nam-ryong à Pyongyang. Baek Nam-ryong a insisté sur son statut d'ouvrier écrivain, qui a commencé par travailler en usine. Il a le souci du mot juste, du terme technique exact, ce qui a d'ailleurs souvent rendu difficile le travail de traduction. Avant la publication du roman en français, un comité nord-coréen a relu le manuscrit, comme il est d'usage en Corée du Nord : en effet, le texte avait ensuite vocation à devenir la traduction officielle en français. Seules des corrections mineures ont été demandées. Les observations des critiques nord-coréens ont ensuite porté plutôt sur la préface de l'édition française, diffusée depuis septembre 2011. 

 

Le succès considérable de Des amis en RPD de Corée, qui a fait de Baek Nam-ryong une personnalité littéraire de premier plan, est dû à sa capacité à avoir parlé, sur un ton juste, de l'histoire d'un divorce qui a une portée universelle quant au relations à l'intérieur du couple. Le héros, ou plutôt le principal protagoniste, est un juge qui doit se prononcer sur la demande de divorce d'une ouvrière, devenue cantatrice, de son mari resté ouvrier. Cet écart de classe n'est pas hérité de l'ancienne société, mais est le produit des contradictions propres apparues au sein de la société de la RPD de Corée. La figure traditionnelle du héros qui se dévoue pour la patrie correspond à une phase littéraire désormais révolue, même si on la retrouve sous les traits d'un personnage tel que l'ancien combattant, décrit dans Dans le bus, de Cho Kun, première nouvelle nord-coréenne publiée en français dans la revue Neige d'août.

 

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La littérature, reflet des contradictions créées par l'évolution sociale

 

La structure sociale qui apparaît dans Des amis est en elle-même le reflet des évolutions en Corée du Nord : la femme qui demande le divorce a un enfant et vit dans une famille nucléaire. Menant son enquête, le juge est aussi amené à réviser ses jugements. Initialement méfiant vis-à-vis de la demande de la cantatrice, il découvre que le mari, inventeur payant sur ses propres deniers le prix des échecs de ses inventions, est aussi quelque peu borné, refusant de faire les études qui lui permettraient de devenir technicien et d'être plus utile à la société. Enfin, le juge est amené à considérer d'autres couples - comme celui de cette institutrice, remarquablement dévouée à ses élèves mais dont le mari boit, et même son propre couple, dont la femme est absente du foyer de longs mois durant pour des expériences de culture des légumes dans son village de naissance, en montagne. N'est-il pas lui-même étroit d'esprit lorsqu'il lui reproche ses longues absences du foyer familial ?

 

D'autres problèmes sociaux sont abordés de manière crue, comme la corruption d'un cadre du Parti qui a offert un vase en plastique au mari inventeur, tout en utilisant l'argent de la récompense promise à des fins personnelles. Le fléau social ainsi dénoncé n'est pas le fait d'un espion américain qui aurait été démasqué ou d'un bourgeois compradore - ces figures sont totalement absentes du récit - mais correspond à la situation, bien réelle, de l'hypocrisie de personnes occupant des fonctions de direction.

 

La littérature nord-coréenne actuelle met ainsi l'accent sur des conflits entre les individus, dans une entreprise ou au sein d'un couple, souvent du fait d'un décalage social apparu avec le développement de la société. De multiples scénarios sont possibles : lui veut grimper par arrivisme, ou encore pour rendre service à la nation, mais elle ne veut pas changer de vie ; ou encore, elle veut devenir artiste pour accéder à la célébrité tandis que lui ne souhaite pas d'autre mode d'existence. Un autre fait nouveau est que, pour résoudre le conflit social naissant, il est fait appel à un protagoniste tiers. Des solutions doivent en effet être proposées, tant pour les acteurs du récit que vis-à-vis du lecteur. La cause des problèmes ne réside pas dans la structure sociale, mais dans des comportements égoïstes des individus - à moins qu'il ne s'agisse de problèmes nouveaux que la société n'a pas encore réglés.

 

Des textes, dont Patrick Maurus prévoit la publication prochaine en français à Actes Sud, offrent une illustration de ces thématiques.

 

Dans La saison bleue, le narrateur, après avoir réussi, rentre dans son village pour y donner des conférences techniques et en faire profiter les habitants de sa commune de naissance. Durant le trajet en train, il est assis à côté d'un jeune voyageur, qui voyage sans titre de transport et est contrôlé. Tous les voyageurs du wagon donnent leur propre opinion sur ce différend, avant que la nouvelle littérature nord-coréenne ne tende le micro au fautif : le jeune homme explique devoir rentrer à son village pour se marier après avoir fini ses études, tout en ayant été dans l'incapacité de payer son billet. Mais ne s'agit-il pas d'une faute minime par rapport à sa responsabilité de rentrer chez lui ? Finalement, tout le wagon se cotise pour lui payer son billet.

 

Dans Le parfum du printemps, le protagoniste est un jeune homme âgé d'une vingtaine d'années à qui tout sourit. Mais il est tombé amoureux d'une paysanne taciturne, sans condition sociale, et ses parents s'opposent à son mariage, sans qu'il ait la force de leur résister. Or, dans une situation normale, l'amour, l'avis des parents et la situation sociale des mariés auraient coïncidé...

 

Enfin, le héros de Souvenirs ne s'est pas présenté aux examens après de longues études payées par ses parents et les habitants de son village. Souffrant d'un complexe d'infériorité sociale, il a préféré ne pas passer ses examens plutôt que d'échouer. Le chef de la commune populaire lui propose alors de se consacrer à ce qu'il sait faire de mieux : écrire, et non cultiver la terre. Malgré les protestations des agriculteurs, le héros devient un bouvier et dramaturge célèbre.

 

S'inscrivant dans la lignée d'une littérature dépeignant des personnages aux prises avec des problèmes sociaux très concrets, Des amis représente le schéma universel du mari qui voudrait que son épouse ait une existence banale de femme au foyer. Mais la femme a toujours une autre activité, qui présente une réelle utilité sociale, plaçant ainsi l'homme devant ses responsabilités dans une meilleure répartition, notamment, des tâches domestiques. 

 

Ces évolutions prennent ainsi place dans un contexte où la famille nucléaire, au Nord comme au Sud de la Corée, est considérée comme l'aboutissement de l'évolution sociale. Comme l'observe encore Patrick Maurus, beaucoup de ses interlocuteurs sud-coréens ont considéré la disparition de la famille élargie comme la principale révolution sociale récente, dans laquelle l'épouse n'est plus l'esclave domestique de sa belle-mère. La disparition des obligations vis-à-vis des beaux-parents a été vécue comme le principal progrès sur le chemin de l'émancipation féminine, selon une perception bien différente de celle des féministes occidentales.

 

La récurrence du confucianisme face aux bouleversements économiques et sociaux

 

Les permanences sociales proviennent non du confucianisme, non pas le confucianisme des textes (dont les plus anciens sont postérieurs de plusieurs siècles à l'époque où Confucius aurait vécu), mais les valeurs considérées comme confucéennes :

- tout d'abord, l'auteur est un maître, dont le rôle social est d'enseigner la vertu ; le principe de Confucius selon lequel il faut penser droit est toujours d'actualité ;

- ensuite, les Coréens considèrent un cycle et un engendrement des générations totalement étrangers à la notion occidentale de progrès ; la vertu reste la même au cours des siècles, et les générations successives doivent enchaîner des comportements vertueux. Que serions-nous si nous voulions remettre en cause des siècles et des siècles de passages de témoin positifs entre les générations ? De cette idée fondamentale découle la piété filiale, le don d'humanisme, l'obéissance aux autorités de ceux qui enseignent la vertu : les pères, les frères aînés, les amis et les monarques. La mort de celui qui enseigne la vertu est alors un événement considérable.

 

La confucianisme s'exprime-t-il de la même façon au Nord et au Sud ? On peut noter, au Nord, l'importance des attributs traditionnels féminins - la maternité, la douceur - attachés à la figure des dirigeants, à la fois père et mère du peuple.

 

Peut-on donc parler d'une nouvelle société nord-coréenne ?

 

Certes, la société nord-coréenne se veut immuable : au-delà des générations de dirigeants qui se succèdent, ce sont les mêmes orientations politiques qui sont poursuivies, et Patrick Maurus observe que cette remarque est très globalement exacte. Pourtant, à la force d'un volontarisme développé avec la même ardeur au Nord et au Sud de la péninsule, le seul surgissement des gratte-ciels à Pyongyang reflète des progrès économiques spectaculaires en l'espace de quelques années, à la mesure des nouvelles bases économiques du décollage : après les inondations des années 1990, toutes les mines de charbon ont enfin été asséchées, permettant de résoudre en partie la question énergétique ; des accords économiques sont en cours de mise en oeuvre avec la Chine et la Russie, dont la montée en puissance des zones économiques spéciales n'est qu'une des traductions ; une classe moyenne urbaine est apparue et utilise ses devises pour l'achat de biens de consommation tels que l'écran plasma ou l'autocuiseur de riz. A ceux qui objectent que Pyongyang ne serait qu'une vitrine, Patrick Maurus répond que les transformations de la ville attestent d'une accumulation primitive de capital par l'économie nord-coréenne, sans précédent depuis des décennies. Sa conviction est que la situation économique n'a jamais été aussi favorable pour un rapprochement Nord-Sud, comme une première étape qu'il distingue de l'horizon, plus éloigné, d'une réunification de la péninsule.

 

Dans ce contexte, la littérature n'apparaît toutefois pas comme une priorité économique. La plupart des nouveaux ouvrages qui paraissent en Corée du Nord sont publiés à moins de 1 500 exemplaires, et sont très rapidement épuisés. Ainsi, Baek Nam-ryong a décidé d'affecter la moitié des droits d'auteur qu'il a gagnés après la vente de son livre en France à une nouvelle édition de Des amis.

 

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Un débat soulignant les perspectives de nouvelles coopération culturelles franco - nord-coréennes

 

Lors du débat avec la salle qui a suivi, un des intervenants a insisté sur les progrès accomplis par la Corée du Nord dans le domaine médical en l'espace de deux voyages réalisés dans un laps de temps rapproché, ce qui est un indice supplémentaire de la rapidité des changements économiques et sociaux en cours.

 

Interrogé sur ses projets académiques futurs, Patrick Maurus a mentionné qu'il participerait à des conférences à Pyongyang en avril prochain. Il a également mentionné la visite imminente à Pyongyang du président de l'Institut national des langues et civilisations orientales (INALCO). Ces projets sont menés sans aucun soutien financier du ministère français des Affaires étrangères et européennes. Si la France a ouvert un bureau de coopération à Pyongyang en octobre dernier, fruit du travail très visionnaire accompli par Jack Lang, en 2009, comme représentant du président de la République française pour la RPD de Corée, le gouvernement français ne s'est pas encore prononcé sur le financement de nouveaux projets de coopération, en dehors des programmes engagés de plus longue date, et ayant caractère plus humanitaire.

 

S'agissant des échanges culturels entre la Corée du Nord et d'autres pays que la France, Patrick Maurus a rappelé l'ouverture par l'Allemagne d'un Institut Goethe à Pyongyang, qu'il avait soutenue lorsqu'il était en poste diplomatique en Extrême-Orient. Si l'Institut Goethe avait ensuite dû fermer pour des raisons strictement financières, l'Allemagne était vue par les Nord-Coréens, dans l'Union européenne, comme un partenaire fiable et privilégié.

 

Il a indiqué que des discussions étaient en cours avec huit autres éditeurs occidentaux, notamment allemands, anglais et espagnols, pour des publications et traductions de Des amis en d'autres langues indo-européennes, probablement à partir de la version française.

 

Sur les conditions de travail des écrivains en Corée du Nord, Patrick Maurus a répondu que tout citoyen était libre d'écrire et d'envoyer ses manuscrits aux maisons d'édition publiques. Si le texte était accepté, l'écrivain acquérait un statut de salarié rémunéré, comme n'importe quel autre travailleur. L'impôt personnel ayant été aboli en Corée du Nord, la rémunération de l'écrivain n'est pas imposable.

 

A propos de l'accès du public nord-coréen à des oeuvres étrangères, Patrick Maurus a pu voir tous les classiques de la littérature européenne, tant dans les bibliothèques publiques que dans celles, privées, de ses interlocuteurs nord-coréens. En ce qui concerne les oeuvres étrangères contemporaines, les feuilletons chinois sont très populaires en Corée du Nord.

 

Le contenu des médias nord-coréens, tous publics, a fortement évolué. Les chaînes de télévision consacrent une place accrue aux nouvelles étrangères, sur des sujets très variés - par exemple, la situation en Libye était largement traitée lors de sa visite en septembre 2011, suivant la ligne éditoriale toujours définie par le gouvernement et les autorités politiques. Sur la forme, les journalistes nord-coréens des médias télévisés recourent plus souvent à des entretiens en direct.

 

Interrogé enfin sur l'accès des Sud-Coréens à la littérature nord-coréenne pour faire évoluer les mentalités, Patrick Maurus a souligné le manque d'intérêt patent de très nombreux Sud-Coréens. Ainsi, une version non autorisée de Des amis avait circulé - clandestinement, en application de la loi de sécurité nationale - au Sud de la péninsule, mais n'avait rencontré qu'un très faible écho. Si des émissions télévisées nord-coréennes étaient néanmoins visibles aujourd'hui sur les écrans du Sud, selon un choix des autorités gouvernementales de Séoul, leur audience est très faible.

 

Photos Bernard Chatreau

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7 février 2012 2 07 /02 /février /2012 14:02

C'est le dernier buzz concernant la République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord) sur YouTube : cinq élèves de l'école secondaire Kumsong de Pyongyang ont bluffé l'artiste Morten Traavik en interprétant à l'accordéon le morceau Take on me du groupe norvégien A-ha, alors qu'il visitait la RPD de Corée en décembre 2011. Le 1er février 2012, Morten Traavik a publié ce morceau sur YouTube, où il a déjà été vu par plus de 500 000 internautes et reçu une appréciation positive de 98 % des visiteurs.

 

Alors qu'il visitait la RPD de Corée pour préparer l'édition 2012 du festival d'art et de culture Barents Spektakel, l'artiste norvégien Morten Traavik a remis à ses hôtes un CD du groupe culte de la pop norvégienne A-ha. Deux jours plus tard, il découvre alors une surprise que lui avaient réservée les élèves de l'école secondaire Kumsong à Pyongyang : cinq jeunes accordéonistes avaient créé une étonnante interprétation du morceau Take on me, qu'il a publiée sur YouTube pour promouvoir le festival qui se tiendra du 8 au 12 février prochains. Le passage réussi du piano à l'accordéon, assez difficile, témoigne de la virtuosité des jeunes artistes.

 

 


 Afin d'apprécier le talent des interprètes coréens, nous publions ci-après le clip original de ce morceau du groupe A-ha.

 

 


 

 

 L'école Kumsong de la capitale est notamment spécialisée dans la musique et regroupe les talents les plus prometteurs, âgés de 11 à 17 ans. Le système éducatif nord-coréen repère très tôt les élèves les plus doués dans les disciplines artistiques et sportives, qu'ils peuvent approfondir dans les palais des enfants présents dans toutes les villes du pays.

 

Le romantisme de la chanson du groupe norvégien reflète bien la sensibilité coréenne, en ayant également inspiré des interprétations au Sud de la péninsule, comme en témoigne ce morceau joué à la guitare par un jeune Sud-Coréen, Jung Sung-ha, également publié sur YouTube.

 

 

 


 

Sources : article publié sur le site "Behind the wall" de NBC News (spécialisé sur les tendances actuelles en Chine), AAFC, Youtube. 

 

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14 janvier 2012 6 14 /01 /janvier /2012 22:59

Les acrobates de la République populaire démocratique de Corée (RPDC, Corée du Nord) ont obtenu le premier prix au 28e Festival international du cirque de Rome "Golden Circus", qui s'est tenu du 23 décembre 2011 au 8 janvier 2012, confirmant leur tradition d'excellence.

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L'époustouflant numéro d'acrobatie de la RPD de Corée "Flying girls" ("Les filles volantes") a obtenu le premier prix au 28e Festival international du cirque de Rome "Golden Circus", qui s'est tenu du 23 décembre 2011 au 8 janvier 2012, et réunissait des acrobates de huit pays - dont la RPD de Corée, le Canada, Cuba, la Mongolie, la Russie et l'Ukraine.

 

Les athlètes nord-coréens ont obtenu également le prix technique du festival italien, le prix artistique et le prix de la Ville de Rome.

 

Les artistes de la troupe de Pyongyang viennent de terminer leur tournée dans le Nord de la France pour rejoindre les Pays-Bas, tandis que d'autres acrobates ont participé à une tournée internationale en Espagne du 3 décembre 2011 au 8 janvier 2012, témoignant de l'excellence de la tradition artistique des acrobates coréens de la République populaire démocratique de Corée.

Sources : AAFC, KCNA. Voir aussi le site du Festival international du cirque de Rome "Golden Circus".

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